Il n’ y a pas si longtemps – avril 2016 – un général de gendarmerie – Bertrand Soubelet – a reçu un savon pour avoir dit et écrit ce qu’il tirait de son expérience. Les pétochards lui sont tombés dessus. Retraité d’office. Après les pillages de l’été 2023, on se dit que ce général devrait recevoir au moins une étoile de plus.

Cette introduction pour vous dire que nous allons parler jardin et compost. . C’est quoi ça, les idées du jardin ? Ce sont toutes celles que nous sélectionnons pour notre petit panier, notre cerveau, en espérant qu’il en fasse bon engrais. Ou autrement dit, qu’il en émerge de bonnes réflexions limpides, judicieuses et stimulantes.

Prenons un contre exemple pédagogique : si vous ne jetez dans le petit panier que des extraits de Mélenchon, cela va irriter le compost.

Survient donc l’enjeu de l’alimentation de notre petite caisse cérébrale. Quand nous allons sur le gigantesque marché des idées et des connaissances, on s’arrête à quels étals ? Une alimentation équilibrée bien sûr ça tombe de source . Oui mais, c’est justement à ce moment là que se pose l’entièreté de la question : qu’est ce que je ramène comme idées à la maison ?

Ce qui est simple à illustrer pour le choix du légume ou du fromage, l’est un peu moins avec ce qu’il faut apporter comme vitamines à notre matière grise. Je prends lesquelles en rayon ? S’il y a un scepticisme décisionnel – il s’observe – il résulte de la trop grande quantité de variétés pour y voir clair. Devant cette profusion grandissante s’opère un glissement du factuel au ressenti.

Le ressenti est devenu le mot valise sympa. Même la température n’est plus objectivée par la mesure ; elle est ressentie. Cette tendance est pleine de sens. Un peu comme si je vous disais qu’en gros je suis d’accord avec la table de multiplication, sauf pour 9 fois 9 : 9 fois 9 je le sens moyen. Pour un autre ce sera 7 fois 7. Nous sommes entrés dans un temps de doute partiel et partial qui se propage dans les milieux de la post-connaissance.

Une explication tient au fait que nos ignorances sont en progression continue, car le stock de connaissances disponibles est devenu sidéral. Si à cela vous ajoutez le vacarme des réseaux sociaux, nous cherchons tous le mot de passe qui ouvre le site Compréhension.

Le monde de la connaissance nous plonge dans un état d’agitation permanente ; il nous met sous tension. Elle implique de lui allouer du temps et de la constance. Mais mon cher Watson quel est le bon savoir de nos jours? Euh… je vais demander à Siri. Ainsi l’instantanéité technologique a créé de la brièveté. Le pitch et le gazouillis .

L »éveillé du wokisme, comme son cousin complotiste, savent que la méconnaissance est propice à la circulation de l’à peu près Le plus ou moins est une réponse suffisante pour la plupart des situations. « L’entendu dire » permet de défier le scientifique.

Pourtant, il reste un levier pour trier, soupeser, et préférer l’exactitude au ressenti. Dans notre carquois il reste l’esprit critique. Celui qui nous recommande de réviser nos croyances et nos biais d’appartenance. Savoir peu, savoir bien.

Démarche très mal commode, s’il en est, car comme le chantait joliment Brassens,  » non les braves gens n’aiment pas que l’on suive une autre route qu’eux ». Est ce que le tocsin écologiste par exemple, n’a pas une plus grande résonance dans les milieux de pensée hostiles aux réussites individuelles ? Et si les bacs de tri pouvaient nous parler de leur ressenti…

La fracture entre les méconnaissants ruminants et les curieux éternels, s’élargit avec l’immensité des nutriments que nous sommes libres d’ingérer ou pas, d’approfondir ou pas. L’usage de notre esprit critique se heurte aussi à notre communauté d’appartenance, car celle ci nous offre un package qui nous débarrasse du laborieux devoir d’étude. Sans compter l’autre opposant organique de l’esprit critique : les croyances, de toute nature.

Si vous souhaitez faire une césure claire entre savoir et croire, en voici une de mon jardin : « croire c’est adhérer de son plein gré à l’invérifiable « . Posture qui procure du confort.

Et notre Général de Gendarmerie à propos ? C’est notre spécialiste en molécules du désordre. Il écrivait que dans le compost, il y avait de la fermentation. De la décivilisation comme disent les sophistes qui nous gouvernent aujourd’hui. Si l’ambitieux veut le pouvoir, il sait qu’il faut floutter la réalité, et donc jouer sur la méconnaissance. C’est pourquoi notre gendarme s’est fait rabrouer, il ne voyait pas assez flou.

Les idées u jardin sont bien celles qui vous ont demandé du temps et de l’observation pour tenir debout, bien abritées des orages médiatiques. La liberté du jardinier est de ne pas être dépendant que de la tomate et de la pomme de terre.

Désherber de temps à autre les idées sèches ne fait que du bien au potager conceptuel.

Bonne pioche.

Diffuser avec le pommeau de l’arrosoir… ..même aux jeunes pousses.